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Apprécier la mort. Ethnographie du suicide assisté en Suisse

Recherche subventionnée par le Fonds national suisse de la recherche scientifique – 01 septembre 2017 – 31 août 2020

Cette recherche consiste en une ethnographie des pratiques relatives au suicide assisté en Suisse. Elle focalise tout particulièrement l’attention sur les différentes formes de connaissances et d’évaluations, sur ce qui fonde une autorité décisionnelle ainsi que sur les manières dont la diversité des actions font sens dans le processus de suicide assisté ; elle s’intéresse aux expériences des personnes qui participent à ce processus et à celles qui le rendent effectif. Par conséquent, le but est d’observer le plus concrètement possible les pratiques sociales mises en œuvre par la pluralité d’individus concernés et sollicités dans l’élaboration d’une demande de suicide assisté jusqu’à son actualisation ; il s’agit par ailleurs de prendre en considération les événements qui suivent immédiatement le décès et de rendre compte de la façon dont chaque suicide assisté observé est mis en récit, sous quelle forme et entre quels acteurs. Cette ethnographie du suicide assisté est réalisée en étroite collaboration avec une série de partenaires de terrain, actifs dans toute la Suisse romande, la région de Bâle et au Tessin. Elle est conduite par une équipe de recherche composée de quatre personnes : Marc-Antoine Berthod, Dolores Angela Castelli Dransart, Alexandre Pillonel et Anthony Stavrianakis.

La recherche vise à documenter environ 10-15 situations en lien avec le suicide assisté ; ces situations prennent place dans un contexte unique, dans la mesure où un suicide assisté – en Suisse – requiert l’aval du corps médical mais n’exige pas l’implication des médecins dans sa mise en œuvre. L’accès à chacune de ces situations est négocié via les différents partenaires de recherche – tous impliqués dans ou concernés par l’une ou l’autre phase du suicide assisté – ainsi que par voie de presse. Une fois obtenu l’accord de la personne qui entend recourir au suicide assisté et en suivant tous les principes éthiques usuels, les chercheurs s’adaptent à la temporalité des procédures en cours et rencontrent, toujours avec leur accord et dans la mesure du possible à plusieurs reprises, le maximum d’acteurs impliqués dans chaque situation (soit entre 6 et 15 personnes) : médecins, personnel infirmier, travailleurs sociaux; pharmaciens ; équipes des associations d’assistance au suicide ; personne requérant l’assistance au suicide et ses proches ; policiers et employés des pompes funèbres. L’objectif est de combiner observations, échanges informels et entretiens approfondis avec ces différents acteurs pour analyser et mettre en perspective la réalité d’une modalité contemporaine de fin de vie et les appréciations différenciées qui la traversent. De plus, il est proposé à certains acteurs de tenir un journal de bord – sorte de chronique quotidienne – sur leur perception et implication dans le processus du suicide assisté afin d’enrichir les données de l’étude.

L’originalité de ce projet réside entièrement dans ce regard ethnographique qui n’a encore jamais été appliqué à cette modalité spécifique du mourir en Suisse. Ce projet fournira par conséquent une plus-value descriptive et scientifique à un enjeu de société hautement débattu de nos jours dans de nombreux pays, dans la mesure où cet enjeu est trop souvent abordé en termes idéologiques et moraux éloignés des relations effectives qu’entretiennent les acteurs impliqués dans le processus qui conduit à l’assistance au suicide. Ce travail ethnographique permettra de rendre compte de deux phénomènes centraux : (1) comment la demande d’une personne est acceptée (ou rejetée), de telle sorte que cette dernière puisse (ou non) mettre fin à sa vie ; (2) comment les différentes évaluations sur la façon d’arriver au suicide assisté, de le réaliser et de le considérer après coup sont vécues et négociées. Cette double facette de la problématique des processus décisionnels et jugements est au cœur de la question fondamentale de l’‘autorité’ : quelles autorités – et sur la base de quelles raisons voire justifications – légitiment le suicide assisté ?

Répondre à ces questions permettra d’ouvrir des pistes théoriques nouvelles sur les diverses formes d’autorité professionnelle, dont l’autorité médicale, et sur la légitimité des différents modèles d’intervention, ainsi que sur l’autonomie et l’intérêt des personnes impliqué-e-s dans ce processus du mourir. En interrogeant le problème contemporain des configurations décisionnelles (médicales, éthiques, familiales, etc.) ainsi que de l’autorité et des jugements éthiques des pratiques autour de la mort volontaire, cette démarche ethnographique favorisera le développement d’une approche réflexive sur les formes que prennent désormais les questions sociales, éthiques et politiques autour du suicide assisté, tant pour les professionnels, que pour les personnes concernées et leurs familles ou encore pour les chercheurs.

Partenaires de terrain

Association Fribourgeoise des Institutions pour Personnes Âgées – AFIPA-VFA.

Association Lifecircle | Fondation Eternal Spirit.

Centre universitaire romand de médecine légale.

EXIT ADMD Suisse romande.

Office des pompes funèbres officielles de la ville de Lausanne.

Office du médecin cantonal, Département de la santé et de l’action sociale du Canton de Vaud.

Palliative and Supportive Care Clinic, Oncology Institute of Southern Switzerland, Ticino.

Pharmacie 24, Lausanne.

Police cantonale Fribourg.

Unité de gériatrie et de soins palliatifs communautaires – Hôpitaux Universitaires de Genève.

Partenaires académiques

Dominique Memmi, Directrice de recherche, Centre National de la Recherche Scientifique, Paris, France

Paul Rabinow, Professeur, Université de Californie, Berkeley, États-Unis

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